24.01.2013
Merci Monsieur Serres!
"Les petites poucettes"
Photographies Louis-Paul Fallot, décembre 2012
Je suis en voiture, c’est le jour de Noël et nous nous rendons au domicile de ma nièce. (une petite poucette jeune maman). En passant devant un collège, nous évoquons avec ma sœur et mon beau-frère des souvenirs d’ados. A l’arrière du véhicule, la « petite » sœur de ma nièce interpelle sa maman. « Qu’est ce qui s’est passé en mai 1968 Maman ? ». Je souris intérieurement : Petite petite poucette est sympa de faire la conversation avec les "vieux" car elle aurait pu avoir la réponse sans nous adresser la moindre parole. Elle a le monde et son histoire entre ses mains et un simple clic après avoir tapé deux mots lui aurait proposé en 0,29 secondes le choix de consulter 41 900 000 réponses.
Petite Poucette a trouvé le sens réel du mot "maintenant". Qu'est-ce que veut dire ce mot-là? Cela veut dire : "tenant en main". Petite Poucette, avec son téléphone portable, tient en main tous les hommes du monde, tous les enseignements du monde, et tous les lieux du monde par GPS. Donc elle peut dire : "main-tenant, tenant en main le monde". Mais qui pouvait en dire autant avant elle? Auguste, empereur de Rome, des grands savants? Aujourd'hui, il y a 3,75 milliards de personnes qui ont un portable avec Internet dedans et qui "tiennent en main le monde". Cela ne fait pas une nouvelle démocratie? Voilà le nouveau monde. C'est vertigineux, c'est ce qui m'impressionne le plus. Que nos institutions sont vieilles face à cela! Il y a tout à reconstruire.(Interview de Michel Serres dans le JDD du 30 décembre 20112)
Ma première idée était de vous livrer quelques extraits, passages soulignés, annotés ; autant vous mettre entre les mains la totalité du livre ! Un matin de ce même mois de décembre, à l’heure du petit déjeuner, j’ai entendu Michel Serres sur France Inter; j’achetais le livre l’après-midi même. Beau cadeau de terminer l’année avec les mots de Serres et mieux que toutes les formules de vœux pour en commencer une autre.
Oui, il faut lire cet ouvrage de 82 pages paru aux éditions le Pommier: "petite poucette". Parce que cela remet les choses à leur place (le constat sur le monde que les adultes laissent aux jeunes est impitoyable, quel réquisitoire aux pages 60 à 62 !), parce que cela parle de l’évolution en des termes novateurs, parce que…parce que ce livre donne de l’espoir tout simplement. Oui, il faut lire, écouter Michel Serres ; et aussi les petites poucettes et je suis heureux d’en connaître dans mon entourage proche.
Michel Serres donne un coup de jeune à bien des idées reçues et vieillissantes et puis, Petite Poucette a 30 ans, et dans dix ans, elle prend le pouvoir.
Le philosophe écrit page 23 qu’ il « voudrais avoir dix-huit ans, l’âge de Petite Poucette et de Petit Poucet, puisque tout est à refaire, non, puisque tout est à faire. Je souhaite que la vie me laisse assez de temps pour y travailler encore, en compagnie de ces Petits, auxquels j’ai voué ma vie, parce que je les ai toujours respectueusement aimés. » Je vous le souhaite aussi Monsieur Serres, avec le plaisir, immense de vous lire encore.
P-S : Il n’y a pas de hasard…Au moment (ce jour à 11h40) où je met un point final à la préparation de cette note en choisissant la photo qui l' illustrera, j'entends, très surpris, la voix de Michel Serres sur France- Inter. Il y a des promos (et surtout des voix) dont je ne me lasse pas!
Quatrième de couverture
Le monde a tellement changé que les jeunes doivent tout réinventer.
Nos sociétés occidentales ont déjà vécu deux révolutions : le passage de l'oral à l'écrit, puis de l'écrit à l'imprimé. Comme chacune des précédentes, la troisième, tout aussi décisive, s'accompagne de mutations politiques, sociales et cognitives. Ce sont des périodes de crises.
De l'essor des nouvelles technologies, un nouvel humain est né : Michel Serres le baptise «Petite Poucette» - clin d'oeil à la maestria avec laquelle les messages fusent de ses pouces.
Petite Poucette va devoir réinventer une manière de vivre ensemble, des institutions, une manière d'être et de connaître... Débute une nouvelle ère qui verra la victoire de la multitude, anonyme, sur les élites dirigeantes, bien identifiées ; du savoir discuté sur les doctrines enseignées ; d'une société immatérielle librement connectée sur la société du spectacle à sens unique...
Ce livre propose à Petite Poucette une collaboration entre générations pour mettre en oeuvre cette utopie, seule réalité possible.
" petite poucette" de Michel Serres aux éditions Le Pommier
Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : petite poucette, michel serres, livre | 12:07 | 
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Commentaires
Moi, Louis- Paul, j'ai écouté Marc Trévidic, son livre " : "Terroristes, les 7 piliers de la déraison"
Envie de comprendre , "Faut-il les appeler moudjahidin, jihadistes, islamistes ou terroristes ?"
et après... ce sera donc "Petite poucette" ! merci !
Bisous
Écrit par : noelle | 24.01.2013
Rien d'autre à dire. Merci peut-être ?
Écrit par : Claudio | 24.01.2013
Il faut dire que, au point de vue des jeunes, nous sommes largués par les progrès techniques... Nos enfants le seront moins parce qu'ils progressent avec les leurs....Bonne après midi.
Écrit par : patriarch | 24.01.2013
"largué?" Je trouve que tu assures bien au contraire sur Internet et les blogues. Après c'est sûr pour les pouces sur le smartphone c'est moins évident mais on arrive (je tape sur mon clavier à un doigt!) à faire passer nos messages et c'est le principal. A toi aussi,bon aprem.
Écrit par : LP | 24.01.2013
J'écoute régulièrement Michel Serres sur France Inter... à propos de maintenant : as-tu remarqué que ce mot est mal prononcé ? on prononce "main-nant" en fait, et c'est dommage...
Autre remarque sur 68... Tu sais Louis-Paul je pense que les "vrais" soixantehuitards sont en fait ceux qui étaient ados en 68... Je crois que tu en fait parti... car l'ado saisit la nouveauté et se l'approprie alors que ceux qui comme moi avaient 20 ans, même si nous étions acteurs, nous avons en fait plus gardé des valeurs et modes de vie traditionnels...
Voilà pourquoi je suis "classique et rebelle" car intellectuellement rebelle mais classique dans mon mode de vie...
bises !
Écrit par : Rosa | 24.01.2013
classique et rebelle...
Tout le contraire de Frigide Barjot !
http://cybermamies.hautetfort.com/archive/2013/01/14/les-manifs.html
Écrit par : Rosa | 24.01.2013
oui, débute une nouvelle ère et faisons confiance à cette Jeunesse en lui souhaitant une réelle connexion et l'ouverture sur ce Monde qui nous manque et que l'on ne comprend plus trop!
Écrit par : fred | 24.01.2013
Si ce livre donne de l'espoir, alors oui, il faut le lire ! Je vais aller le mettre dans mon panier sur Amazon, et lorsque je passerai une commande, il sera très vite chez moi ! :-)
Belle fin de semaine à toi, Louis-Paul. Je t'embrasse.
Écrit par : Françoise | 24.01.2013
Je le prend en note, ça m'intéresse de le lire. C'est une belle invention avec plein de possibilités.
Écrit par : Solange | 25.01.2013
Je ne connaissais pas le terme "poucette" mais je le trouve bien adapté. j'admire souvent au restaurant le midi ou dans les transports la dextérité de ces jeunes qui écrivent des SMS avec le pouce à une vitesse phénoménale.
Je ne connais pas St Paul de Vence du tout, inutile de faire le jeu mais je reviendrais néanmoins lire l'article dans sa totalité. Bon week-end
Écrit par : Martine Eglantine | 25.01.2013
Lorsque l'esprit est ouvert, il absorbe comme une éponge,prend, il y a tant à prendre dans la vie et par répercussion dans la société.
La curiosité d'apprendre, l'envie de savoir, l'émerveillement de comprendre et parfois de connaître, c'est fabuleux non?
Oui je le conçois il est bon de lire certaines lectures, si elles n'aprennent pas elles ont au moins le mérite de "donner du bois au feu de le réflexion", du grain à moudre. Ensuite restera à savoir que faire de la farine? Les générations qui se succèderont auront encore à faire. Il y aura encore bien des "mai 68", C'est dans la nature de l'humain de remanier l'humanité, les mots, la communication, l'évolution quoi...! Merci de nous montrer ta passion et avec quel plaisir tu la partages (je dirai tes passions).Avec toute mon amitié et le plaisir de te lire dans toutes tes oeuvres..........
Écrit par : Robert de Nice. | 25.01.2013
@Toutes et tous
Merci. Et comme ici, on aime partager, par une note, un courriel, un commentaire, je ne résiste pas à vous livrer un autre petit extait de cet ouvrage de Michel Serres:
"Sans toujours nous en douter, nous vivons ensemble, aujourd'hui, comme enfants du livre et petit-fils de l'écriture." C'est à la page 31. Très bonne journée.
Écrit par : Louis-Paul | 25.01.2013
Oui, je me souviens... d'écrits un peu lointains, déjà.. de Michel Serres un beau livre : "Les cinq sens" qui collait complètement de manière occidentale à ce concept oriental, chinois dois-je dire, et que j'ai savouré en pensant à cet homme qui avec son savoir nous conduisait vers un ailleurs... meilleur.
Merci de tes passages sur mon blog.
Belle soirée.
Evelyne
Écrit par : evelyne b. | 25.01.2013
j'aime bien Michel Serres, il est optimiste :)
Écrit par : eva | 26.01.2013
... avoir de l'intérêt, LP, un peu d'envie et surtout aller de l'avant... souviens toi : "l'avenir je l'ai devant moi ! mais je l'aurai dans le dos chaque fois que je me retournerai !" ceci étant, nous devons vivre avec nos souvenirs... quoique : le moins possible ! non ?!
Bonne continuation !
;o)
Écrit par : Doume | 29.01.2013
La pensée de Michel Serres n'est pas optimiste mais désespérante pour les enseignants. En voici une longue et méticuleuse analyse : http://www.laviemoderne.net/lames-de-fond/037-l-acculture-en-serres.htm
Écrit par : Loys | 29.01.2013
Merci d’avoir déposé ce commentaire ainsi que le lien qui m’a permis
1/ de découvrir votre site
2/ de lire le (très) long article consacré à l’essai de Serres (le terme essai me paraît plus approprié que celui de livre)
Bien que ne partageant pas votre avis, j’y ai trouvé des éléments de réflexion très intéressants.
Ado de mai 68, je suis aujourd’hui persuadé (sourire : oui, j’ai mis du temps, je le confesse ) qu’il ne sert à rien ou pas grand-chose de vouloir changer le monde mais qu’il s’agit d’en construire un autre. Nos vieux schémas du siècle passé ont tous montré au mieux leur insuffisance, au pire leur nocivité. La seule révolution qui persiste (permanente) est celle de l’avancée des technologies et cela ne me semble pas incompatible avec le maintien et l’apprentissage des valeurs (dont la laïcité). Il me semble que le premier rôle de pédagogue devrait revenir non au corps enseignant mais aux parents.
Je ne pense pas que l’on puisse opposer Camus à Serres. Comme personne ne peut dire ce qu’aurais écrit Albert Camus en 2013. « Empêcher que le monde ne se défasse », c’est pourtant la réalité d'aujourd’hui. N’a-t-on pas envie que les jeunes fassent un monde, forcément différent du nôtre.
Il me semble qu’il y a matière à partage entre jeunesse et vieux « pas sages ».
P-S: Je vous prie d’excuser d’éventuelles fautes d’orthographe dans ce commentaire, merci encore de votre passage ici.
Écrit par : LP | 05.02.2013
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