04.12.2014
La géométrie en rouge de Varini
C’est sur la terrasse de la Villa Arson que je découvris pour la première fois une œuvre de Felice Varini. Et si l’an passé, j’avais pu voir l’exposition consacré à Felice Varini à Nantes, ce n’est que cet été que j’ai pu - enfin ! - voir la suite de Triangles à Saint Nazaire et œuvre du parcours artistique Estuaire depuis 2007.
"Le travail de l’artiste franco-suisse Felice Varini, né en 1952, s’inscrit dans le champ de la peinture. Depuis les années 1970, qu’il s’agisse d’espaces fermés ou de paysages urbains, sa peinture se déploie en dehors du tableau, à même les éléments architecturaux en présence. Ici, l’ampleur du paysage et son caractère industriel ont renouvelé sa capacité à explorer et révéler l’espace : l’œuvre, dressée sur 2 km, est la plus grande jamais réalisée par l’artiste. " (1)
L’artiste explique sur son site (2) - très complet- sa démarche :
L'espace architectural, et tout ce qui le constitue, est mon terrain d'action. Ces espaces sont et demeurent les supports premiers de ma peinture. J'interviens in situ dans un lieu à chaque fois différent et mon travail évolue en relation avec les espaces que je suis amené à rencontrer.(…) J'appelle point de vue un point de l'espace que je choisis avec précision (…) Le point de vue va fonctionner comme un point de lecture, c'est-à-dire comme un point de départ possible à l'approche de la peinture et de l'espace. La forme peinte est cohérente quand le spectateur se trouve à cet endroit. Lorsque celui-ci sort du point de vue, le travail rencontre l'espace qui engendre une infinité de points de vue sur la forme. Ce n'est donc pas à travers ce premier point que je vois le travail effectué ; celui-ci se tient dans l'ensemble des points de vue que le spectateur peut avoir sur lui. (…) Je pars d'une situation réelle pour construire ma peinture. Cette réalité n'est jamais altérée, effacée ou modifiée, elle m'intéresse et elle m'attire dans toute sa complexité. Ma pratique est de travailler "ici et maintenant".
Toujours sur le même site , Bernard Fibicher (3) nous donne un éclairage sur les trois processus de transformation dont on peut déceler des traces dans les travaux de Varini :
"Le travail d'élaboration favorise la représentation (création d'une situation plastique), la condensation (fusion de plusieurs éléments latents en une seule image manifeste) et le déplacement (transfert de la charge émotionnelle de son objet réel à un autre objet). »
« Ces derniers nous renvoient finalement toujours à nous mêmes, ils fonctionnent comme des révélateurs par rapport à notre position dans "la réalité" : ils fonctionnent comme des rêves, et "le rêve est le théâtre où le rêveur est a la fois l'acteur, la scène, le souffleur, le régisseur, l'auteur, le public et le critique". (*) "
Mais quel artiste est Varnini ? Dans le catalogue de la collection du Centre Pompidou (4), Nadine Pouillon nous explique que
"Felice Varini ne se reconnaît ni comme peintre, même s’il utilise les attributs de la peinture, ni comme sculpteur, bien qu’il travaille avec les réalités de la sculpture, ni comme photographe, même si la photographie est présente chez lui, ni comme architecte, bien qu’il travaille toujours en fonction d’un espace architectural.
Chacune de ses œuvres investit en effet d’abord un lieu et s’y déploie dans ses trois dimensions, invitant le spectateur à déambuler jusqu’à ce qu’il trouve, comme l’explique Varini, le point exact d’où a été réalisée l’œuvre ."
C’est donc de la terrasse panoramique et qui offre un point de vue exceptionnel sur le port et l’estuaire que j’ai pris cette série de photos.
"À partir d’un point de vue situé sur le toit de la terrasse, Felice Varini matérialise une “ligne” qui embrasse le paysage du port. Telle une partition, les formes disposées successivement sur le haut et le bas de cette ligne scandent le paysage en différentes séquences. L’artiste révèle une forme peinte sur un seul plan, forme qui se détache et se superpose à l’architecture à laquelle elle semble appartenir. Quitter le point de vue revient à faire l’expérience de la troisième dimension et à assister à l’éclatement de la figure. "(1)
Photographies Louis-Paul Fallot, St Nazaire, juillet 2014
Passionné de l’œuvre de Varini, j’ai consulté de nombreux sites et documents sur l’artiste et son travail. Parmi eux, ceux qui m’ont permis de réaliser cette Note et dont j’ai regroupé ci-dessous les références avec les liens correspondants:
(1) Extrait de la présentation de l'œuvre « Suite de triangles » à Saint-Nazaire sur le site www.estuaire.info/fr
(2) Extrait de « démarche » index du site varini.org, le site Internet de Felice Varini
(3) Bernard Fibicher, Extrait de « Perspectives particulières et lieux communs »
(*) Carl Gustav Jung, L'âme et la vie, 1963 Paris, p.94. (Note de bas de page n° 13)
(4) Nadine Pouillon (Extrait du catalogue Collection art contemporain – Centre Pompidou )
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26.08.2014
Sur la plage de Monsieur Hulot
Sur la plage de Monsieur Hulot
Monsieur Hulot à Saint-Marc
Photographie Louis-Paul Fallot, été 2014
Saint Nazaire n’est pas que ports et industries, c’est aussi – avec l’arrivée du chemin de fer en 1857– l’une des premières stations balnéaires. Et parmi ses plages, l’une des plus belles de cette Côte d’Amour est étroitement liée à l’histoire du cinéma français. A Saint-Marc, dans la rue qui mène vers la plage, il y a grand choix de Cartes Postales illustrant des affiches d’un film célèbre de Jacques Tati et Monsieur Hulot nous attend en cette heure matinale sur l’esplanade qui domine le sable fin et la mer.
Tout cela est d’ailleurs au départ une histoire de Cartes Postales :
"Après le triomphe de "Jour de Fête", grand prix du cinéma français 1949, Jacques Tati entreprend de saisir "la vie toute simple, l'atmosphère des vacances", à Saint-Marc, à Saint-Nazaire. Quand il débarque avec son équipe fin juin 1951, les habitants ne savent pas encore qu'ils vont devenir les héros d'une œuvre qui fera le tour du monde. C'est à partir d'une carte postale que Tati découvre Saint-Marc où le réalisateur trouve presque tous les ingrédients dont il a besoin : la mer, la corniche, les rochers, la plage, l'hôtel, les colonies de vacances. (…) "
(Extrait de Saint Nazaire, la ville aux 20 plages)
Le film deviendra un classique du cinéma français, et l’on peut en voir une version restaurée. Un extrait de la critique tv de Télérama François Gorin : « Pour son deuxième long métrage, après le rural Jour de fête, Jacques Tati dépêche un hurluberlu à la plage, où se côtoie sans se mêler la France des congés payés de l'après-guerre. Mais ce Hulot que tout singularise (vêtements, posture, voiture, manières uniment polies) est le seul à réellement désirer ce temps de vacance. Le comique naît de ce que son engouement est en contradiction avec les choses ou les gens qui l'entourent. Ses moments de plaisir (écouter du jazz à fond dans sa chambre, jouer au ping-pong avec un enfant) heurtent les autres clients de l'hôtel. Ses grands élans de courtoisie provoquent de petites catastrophes. Tout est question d'équilibre - ô combien précaire - dans cette chronique faussement nonchalante, bercée par une musique liquide et fluette. La tenue même de Hulot, mains posées sur les hanches, comme pour s'empêcher de tomber, est le symbole de cette instabilité. Voici la figure, immédiatement familière et parfaitement stylisée, de l'homme à la place jamais définie, et dont la liberté est à ce prix. »
Illustration : La plage de Saint Marc, l’une des plus belles de la région et qui se nomme désormais "Plage de Monsieur Hulot" . La sculpture a été réalisée par Emmanuel Debarre.
Photographies Louis-Paul Fallot, 2014.
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22.08.2014
L’alvéole 14
L'alvéole 14 et le LiFE
Ce matin-là, direction St Nazaire et avec notre "guide " (un grand merci à mon frère), nous allons (enfin) voir "la suite de Triangles de Varini", une des œuvres pérennes d’Estuaire depuis 2007.
Nous en parlerons ici bien-sûr mais avant Laurent nous emmène dans l’ancienne base sous-marine.
Le bâtiment est impressionnant.
C’est un gigantesque Bunker : 295 mètres de long, 130 mètres de large et 15 à 19 mètres de haut, il couvre une surface de 3,7 hectares. La base des sous-marins est organisée en 14 alvéoles, dont 6 à flot. Son toit en béton armé mesure 4 à 9 mètres d’épaisseur peut-on lire sur le site Internet de la mairie de Saint Nazaire. Si 85 % de la ville dut détruite à la fin de la 2ème guerre mondiale, la base des sous-marins construite par l’armée allemande est restée quasi-intacte.
Et à partir de 1949, Saint t Nazaire fut reconstruite est en tournant le dos à ce passé et au port. Mais « depuis 20 ans, la ville a entrepris de reconquérir ses espaces portuaires, avec pour volonté de retourner la ville sur son port et sa façade atlantique : le quartier Ville-Port est né. Le projet urbain qui en a découlé, initié par Manuel de Solà-Morales, a permis de révéler l’atmosphère du port et d’affirmer sa destination touristique et culturelle. L’approche initiée par la ville depuis 1994 vise à transformer la base sous-marine en un lieu habitable, doté de fonctions culturelles et sociales. " (Extrait du site Internet mairie de St Nazaire)
Le LiFE est né en 2007 dans l'alvéole 14 et il accueille une programmation pluridisciplinaire. On peut y voir des expositions et des installations, des concerts et des spectacles dans des formes et des espaces non conventionnels. La programmation du LiFE investit également les rues et le toit de la base des sous-marins. Le LiFe, avec Le Grand Café - centre d’art contemporain - expose Distance de l’artiste danois Jeppe Hein judqu’au 5 octobre 2014. (*)
"Jeppe Hein pose les principes de gravité et de mouvement comme fondements à son œuvre sculpturale, tout en se délectant de la portée illusionniste de certains matériaux utilisés comme le miroir. Ses installations ou ses sculptures, des objets épurés et géométriques souvent munis d’un système de capteurs de présence, mettent en place un dialogue incongru entre l’œuvre et le visiteur dont la présence sert de catalyseur. Grâce à son dessin modulaire, Distance est une installation spécifique qui s’inscrit dans un rapport direct à la configuration spatiale de son lieu de présentation."
Les visiteurs, tentés de suivre les ballons propulsés sur la piste grâce à leur présence, commencent à faire l’expérience de l’architecture en tant que structure mouvante et dynamique. Tous les ballons sont identiques, roulent à la même vitesse par la seule impulsion de départ et gardent progressivement les traces de leur précédents passages. La machine, tel un automate, contrôle précisément son propre système, sans pour autant fabriquer d’objet. Le résultat est une sculpture cinétique énorme et renversante.
Telle des montagnes russes à la composition graphique et sculpturale sur lesquelles circule une série de balles blanches, Distance engage le visiteur dans un dialogue insolite avec l’œuvre d’art qui semble réagir à sa présence, joue avec la perception de l’espace et le temps de la trajectoire. Produite dans une version inédite pour l’espace monumental du LiFE, Distance propose un parcours tout en équilibre, en suspens et en invitation contemplative.
Courez voir cette expo si vous êtes dans la région! Enchantement garanti pour petits et grands et merci au LiFE d'avoir tourné cette vidéo et de permettre ainsi d'avoir un aperçu de l'œuvre de Jeppe Hein.
Filmé par Sylvain Huet – Avis d’éclaircies
Courtesy Johann König, Berlin et 303 Gallery, New York
(*) Le Grand Café (Centre d’Art Contemporain de la ville de St Nazaire) est situé en ville et le LiFE (Lieu International des Formes Émergentes) à la Base sous-marine.
Publié dans Art, Découvrir, Voyage | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : carnet de vacances été 2014, bretagne, estuaire, saint nazaire, life, alvéole 14, jeppe hein, une note fleuve pour un estuaire | 08:04 | Facebook | Imprimer