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28.02.2013

Poème, photos, en hommage

 

La poésie comme respiration, la poésie comme colonne vertébrale, la poésie comme nécessité.

(extrait de la présentation du recueil paru chez Seuil O ma mémoire : la poésie, ma nécessité de Stéphane Hessel, voir plus bas)

 

Lever de soleil-PhotosLP Fallot.jpg
Lever de soleil sur la ville, Cagnes sur Mer le 28 février 2013
Photographie Louis-Paul Fallot

 

 

Quand le front de l’enfant, plein de rouges tourmentes,
Implore l’essaim blanc des rêves indistincts,
Il vient près de son lit deux grandes sœurs charmantes
Avec de frêles doigts aux ongles argentins.

Elles assoient l’enfant devant une croisée
Grande ouverte où l’air bleu baigne un fouillis de fleurs,
Et dans ses lourds cheveux où tombe la rosée
Promènent leurs doigts fins, terribles et charmeurs.

Il écoute chanter leurs haleines craintives
Qui fleurent de longs miels végétaux et rosés,
Et qu’interrompt parfois un sifflement, salives
Reprises sur la lèvre ou désirs de baisers.

Il entend leurs cils noirs battant sous les silences
Parfumés; et leurs doigts électriques et doux
Font crépiter parmi ses grises indolences
Sous leurs ongles royaux la mort des petits poux.

Voilà que monte en lui le vin de la Paresse,
Soupir d’harmonica qui pourrait délirer;
L’enfant se sent, selon la lenteur des caresses,
Sourdre et mourir sans cesse un désir de pleurer.

 Arthur Rimbaud, Les Chercheuses de Poux.

 

 

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L'amandier, Cagnes le 28 février 2013, photo Louis-Paul Fallot

 

 

La photographie est aussi pour moi poésie. Je dédie ces  photos (prises ce matin) à Stéphane Hessel, un hommage, un parmi les innombrables dans le monde depuis hier.

Le grand résistant, le déporté à Buchenwald, le diplomate qui participa à la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme, l’homme engagé auprès des sans-papiers…l’homme qui aimait la poésie! 

Il  récitait  ses poèmes préférés et en  connaissait  par cœur plus d’une centaine; il  avait publié en 2006, chez Seuil,   O ma mémoire : la poésie, ma nécessité.   On y retrouve Apollinaire,  Rilke, Villon…
Stéphane Hessel en a aussi enregistré et je vous propose de l’écouter sur France Culture dans un poème  d’Arthur Rimbaud, “Les Chercheuses de Poux”.

 

27.02.2013

Un résistant! (hommage à Stéphane Hessel)

 

93 ans. C’est un peu la toute dernière étape.
La fin
n'est plus bien loin.
Quelle chance de pouvoir en profiter
pour rappeler ce qui a servi de socle à mon engagement politique : les années de résistance…

 

hommage,stéphane hessel,livre,résistanceCe sont les premières lignes, de la 1ère édition, parue en octobre 2010 du manifeste "Indignez-vous!" aux éditions Indigène.. Je me souviens de l’avoir cherché, au moment de la pause repas dans une grande librairie près de mon lieu de travail. Un exemplaire « perdu » au milieu d’autres ouvrages…C’était en décembre et avant qu’il ne soit en tête de gondole dans sa... énième édition ! (Lire ma Note du 28 janvier 2011). 


Crédit photo:
Stephane Hessel au Salon du Livre 2012
pour l'ouvrage co-écrit avec Edgar Morin
"Le chemin de l'espérance".
Photo © BestImage

 

Celui qui écrit ces lignes - et dont le grand-père fût de cette résistance et en paya le prix de sa vie - fût heureux de lire ces lignes d’espoir écrit par le vieux monsieur. Je n’ai jamais voulu polémiquer sur tel ou tel aspect de ce livre, l’important était pour moi ailleurs. Page 12 par exemple "Je vous souhaite à tous, à chacun d'entre vous, d'avoir votre motif d'indignation. C'est précieux. Quand quelque chose vous indigne comme j'ai été indigné par le nazisme, alors on devient militant, fort et engagé. On rejoint ce courant de l'histoire et le grand courant de l'histoire doit se poursuivre grâce à chacun." Vous étiez jeune d'esprit Monsieur Hessel, merci de votre témoignage, de votre engagement, de vos messages d’espoir.
Un dernier extrait (page 20) de votre livre pour vous rendre hommage:

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26.02.2013

Bâtir notre cathédrale (Résilience, compétence et travail sur soi)

 

 Résilience2-PhotosLP.jpg

 Avertissement au lecteur : Une Note au format exceptionnellement long en texte est inhabituelle sur ce blogue; en voici les raisons : Mes travaux de ce début d’année ainsi que des discussions personnelles m’ont amené à lire ou relire des récits, textes, documents qui illustrent et/ou explicitent le concept de résilience. Je l’ai fait avec ce recul par rapport à ma propre expérience, ce qui me permet de mettre -modestement- en adéquation le savoir, le ressenti et le vécu et qui donne à mes relectures une saveur nouvelle, un sens approfondi de compréhension pour ne pas employer un terme qui pourrait paraître péremptoire et que pourtant j’ai envie d’employer, celui de l’évidence. Mes pages dites des 23 septembre -date à laquelle j’ai posé mes premiers pas sur le chemin de cette résilience en sortant du déni et en acceptant en premier de me faire soigner- racontent ce travail de résilience, de construction de « nouvelle vie ». Elles me sont personnelles mais comme je l’écris souvent, je les partage comme les lignes de cette Note pour témoigner, à la fois de ma gratitude envers tous ceux qui m’ont aidé et pour délivrer ce message que la souffrance n’est pas une fatalité, que l’espoir est toujours là.

 

 

Résilience, compétence et travail sur soi

C’est dans les pays anglo-saxons et nord-américains qu’eurent lieu les premiers travaux sur  le concept de résilience qui  a  pris son essor plus tardivement, dans les  années 1990,  dans les pays francophones.  Si un jour nous arrivons à bien structurer nos observations, nos expérimentations et nos théories, je pense que nous en ferons une théorie de l'anti-fatalité, de l'anti-destin  déclarait Boris Cyrulnik dans un colloque qui  a fait a fait l’objet d’un livre « Entre résilience et résonnance »,  avec  pour objet: traiter de la place de l’émotion en thérapie.  (Voir ma Note du 27 août 2009 « A l'écoute des émotions »).
Voici la définition de la résilience,   proposée  par Michel Manciaux, Stefan Vanistendael, Jacques Lecomte et Boris  Cyrulnik en 2001 : c’est la capacité d’une personne ou d’un groupe à se développer bien, à continuer à se projeter dans l’avenir en dépit d’événements déstabilisants, de conditions de vie difficiles, de traumatismes sévères.
Je ne suis pas un spécialiste de la résilience - un acteur oui je pense - et ne vais donc pas m’essayer ici à développer  ce concept qui a fait l’objet de nombreuses études  et essais. Votre moteur de recherche se fera un plaisir de déposer en PDF   sur l’écran de votre ordinateur ou  vous donnera  les références des  ouvrages  que vous pourrez vous procurer sur ce sujet et dans la version de votre choix, papier ou numérique. Non, comme je l’ai mis en titre à ce billet, je voulais juste noter dans ce blogue qui est aussi   mon « Carnet de nouvelle vie » - que c’est pour moi une notion fondamentale sur laquelle j’ai ressenti le besoin de faire un point d’étape, d’en approfondir ma compréhension et de le  partager avec mes lecteurs.
Quelles compétences, quelles  notions du  travail sur soi sont nécessaires  à associer au concept et au travail  de résilience ?

Dans un débat organisé par Psychologie magazine, Boris Cyrulnik et Luc Ferry qui se rencontraient pour la première fois à cette occasion dialoguent  autour du thème  « Ce qui nous tient debout ».  Boris Cyrulnik évoque  cette maison que l’on se construit et qui parle de notre vision du monde . Il rappelle la fable racontée dans son livre Parler d’amour au bord du gouffre (page 35 de l’édition poche chez Odile Jacob). La voici :

"Un  pèlerin  se rend à Chartes et va rencontrer sur sa route trois hommes qui cassent des cailloux
 Le premier grimace, respire le malheur. Alors le pèlerin s’arrête et l’interroge :
-Monsieur, qu’est-ce que vous faites ?
 L’homme, malheureux, lui répond :
-J’ai trouvé ce métier stupide et mal payé. Et j’ai mal au dos.
Le pèlerin continue son chemin et voit un deuxième homme un peu plus loin, torse nu en train de casser des cailloux. Il lui pose la même question :
-Monsieur, qu’est-ce que vous faites ?
-Eh bien moi, je gagne ma vie comme ça, au moins c’est en plein air, lui répond l’homme.
Plus loin, le pèlerin voit un troisième homme occupé au même travail. Ce dernier respire le bonheur.  -Monsieur, qu’est-ce que vous faites ?  Et l’homme lui répond :
-Moi ? Je bâtis une cathédrale ! "


Pour Boris Cyrulnik, « cette fable   montre que celui qui a une cathédrale dans la tête métamorphose la manière dont il éprouve le réel. Le troisième homme souffre du réel, comme les autres, mais il a une représentation de ce caillou qui lui donne sens. ». Et il poursuit « Je dirige actuellement des thèses sur les survivants résistants dans les camps de déportés. On y constate que ceux qui ont le mieux supporté l’horreur sont ceux qui avaient une « cathédrale dans la tête ». Le simple fait d’imaginer la même cathédrale faisait qu’ils s’aimaient entre eux et pouvaient vaincre leur peur grâce à elle. C’est alors une sublimation nécessaire, dans laquelle il y a de l’affect, du lien, de la représentation d’images… »

Luc Ferry lui répond et nous met en garde : « Le problème, c’est que la cathédrale peut être délirante. Il ne faudrait pas prendre la fable comme si elle revenait à dire : à partir du moment où vous croyez en quelque chose, c’est bien. Non, ce n’est pas forcément bien ! L’idée de transcendance elle-même peut être un nouveau délire, et Dieu sait qu’elle l’a été, qu’elle l’est encore parfois aujourd’hui ». Il poursuit : « l’une des grandes questions qui se pose aux sociétés laïques est sans doute la suivante : quelles valeurs spirituelles et morales, en exigeant des sacrifices de l’individu, peuvent lui permettre de sortir de lui ? L’idée que l’on va tout trouver en soi – idée qui domine parfois le discours psy, certains retours au bouddhisme ou certains thèmes de développement personnel – est une immense illusion, liée justement à la logique du monde de la consommation. »

Ce dialogue passionnant entre les deux hommes démontre  que la résilience est un concept complexe. Et qu’être résilient n’est pas un acquis pour la vie, qu’elle exige de poursuivre le travail sur soi, d’être conscient de l’environnement dans lequel nous vivons et d’être toujours en situation de vigilance, face notamment à un évènement, mineur ou majeur et qui peut réveiller –souvent inconsciemment- de vieilles blessures enfouies. La compétence à vivre une « nouvelle vie » passe donc  par la compréhension et le désir de ne pas s’endormir sur ce qui  pourrait être considéré comme des acquis. C’est le sens que j’essaye de donner quand j’évoque sur ce blogue ou dans les commentaires que je dépose sur d’autres sites de ce réseau social  tout ce  que j’estime indispensable à mon bien être.  Je terminerais ce billet –  que (je me répète),  j’avoue bien volontiers avoir écrit en premier lieu pour me fixer quelques notes  issues de réflexions, vécus, lectures, partages- en citant Rosette Poletti et Barbara Dobbs. Ces deux auteurs, dans un petit ouvrage  de vulgarisation nommé   «La résilience,  l’Art de rebondir »  paru chez Jouvence nous donnent  un message d’espoir : La résilience est une capacité humaine fondamentale. Tous les individus et à tout âge ont le pouvoir de se transformer et de transformer leur réalité à condition de trouver en eux et autour d’eux les éléments qui leur permettent de créer cette capacité de résilience.» (Page 29 de l’édition de poche)

Vous trouverez, insérés dans la Note quelques liens, volontairement en nombre très limité. De nombreux autres textes, récits,  compte-rendu d’études, colloques, débats, listes d’ouvrages… sont disponibles sur Internet. Je tiens ceux que j’ai notés à disposition.   

 

Résilience1-PhotosLP.jpg

 

Crédits photos : Louis-Paul Fallot
En haut, la cathédrale Notre-Dame de Paris, octobre 2012
En bas, le port du Cros de Cagnes,  fleur sortant du filet de pêche, janvier 2013