13.06.2011
Besoin de mer
Oui, j’aime la Méditerranée. Rien n’y fait défaut à mes yeux sauf l’estran. Je ne m’habitue pas à cette mer constamment haute, j’ai le sentiment de ne l’avoir pas « méritée », de ne l’avoir pas guettée, attendue, d’en ignorer la face cachée. Il ne me suffit pas de m’immerger pour réparer l’anomalie ; j’aimerais marcher, marcher au fond de la mer.
Hervé Hamon, Besoin de mer, page 104, collection POINTS
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10.05.2011
Je me sens chez moi
« J’ai vécu des saisons entières en pleine nature dans une famille nombreuse et solitaire. Elles reviennent toujours, les saisons, sauf le jour de la mort. Plus tard, j’ai dû m’habituer à d’autres visages de la France, celui de la montagne, de l’industrie, des corons, des banlieues. Je les ai abordés avec le même goût de connaître ce pays, le mien, si divers, si varié et pourtant semblable à lui-même, un. Mais il me faut, pour ne pas m’égarer, garder le rythme des jours avec un soleil qui se lève, qui se couche, le ciel par-dessus la tête, l’odeur du blé, l’odeur du chêne, la suite des heures. D’où le mal que j’ai à retrouver mes pistes dans la France du béton. Mais là encore, puisque c’est la France, aussi, je me sens chez moi. »
François Mitterrand – La paille et le grain
Méailles, mai 2011
PhotosLP Fallot
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06.04.2011
La prière d'Aimé Césaire
et voici au bout de ce petit matin ma prière virile
que je n’entende ni les rires ni les cris, les yeux fixés
sur cette ville que je prophétise, belle,
donnez-moi la foi sauvage du sorcier
donnez à mes mains puissance de modeler
donnez à mon âme la trempe de l’épée
je ne me dérobe point. Faites de ma tête une tête de proue
et de moi-même, mon cœur, ne faites ni un père, ni un frère,
ni un fils, mais le père, mais le frère, mais le fils,
ni un mari, mais l’amant de cet unique peuple.
Faites-moi rebelle à toute vanité, mais docile à son génie
comme le poing à l’allongée du bras !
Faites-moi commissaire de son sang
faites-moi dépositaire de son ressentiment
faites de moi un homme de terminaison
faites de moi un homme d’initiation
faites de moi un homme de recueillement
mais faites aussi de moi un homme d’ensemencement
faites de moi l’exécuteur de ces œuvres hautes
voici le temps de se ceindre les reins comme un vaillant
homme –
Mais les faisant, mon cœur, préservez-moi de toute haine
ne faites point de moi cet homme de haine pour qui je
n’ai que haine
car pour me cantonner en cette unique race
vous savez pourtant mon amour tyrannique
vous savez que ce n’est point par haine des autres races
que je m’exige bêcheur de cette unique race
que ce que je veux
c’est pour la faim universelle
pour la soif universelle
la sommer libre enfin
de produire de son intimité close
la succulence des fruits.
Aimé Césaire Cahier d'un retour au pays natal
LIEN : Sur Saison 2 Hommage à Aimé Cézaire
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