28.09.2013
C’est le temps…
Il y a une naissance simultanée de nos yeux et du monde,
un sentiment de " première fois "
où ce qui regarde et ce qui est regardé se donnent le jour.
La présence pure, Christian Bobin
C’est le temps des chemins sur les sentiers de Haute-Provence…
J’en ai parlé dans ma précédente Note. J'y suis allé bien sûr, sur celui des Sembles, et aussi sur les autres qui mènent aux châtaigniers de Méailles ou du Fugeret.
C’est le temps de l’élément Eau, que les druides associaient à l’équinoxe d’automne.
Le saumon, en remontant le courant vers la source, symbolise la quête spirituelle de l'homme. (Extrait du site Internet calendrier celtique)
C’est le temps du raisin Framboise et celui des amitiés, en bas ou en haut des escaliers…
C’est le temps sans télé, des parties de Scrabble, des lectures particulières et des petits plats cuisinés. C’est le temps d’une douceur d’entre saisons où il fait bon marcher, photographier, pique-niquer, méditer, rêver, aimer….
C’est le temps des arbres mais de cela je parlerai plus tard.
C’est le temps des teintes dorées, de la terre qui se repose, des fougères qui les premières s’habillent aux couleurs de l’automne.
C’est le temps d’une fin d’été et d’un début d’automne, en Haute-Provence.
C’est aussi le temps du souvenir, de la gratitude et de l’instant présent ; celui où je mesure le temps d’un chemin parcouru depuis maintenant dix ans . C’est le temps de l’errance apaisée.
Photographies Louis-Paul Fallot, Haute-Provence, septembre 2013
Publié dans Les Saisons de Méaille, Nouvelle Vie, Provence | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : 23 septembre, nouvelle vie, saison, méailles, le fugeret, annot, photo, automne, automne 2013, christian bobin | 09:58 | Facebook | Imprimer
26.02.2013
Bâtir notre cathédrale (Résilience, compétence et travail sur soi)
Avertissement au lecteur : Une Note au format exceptionnellement long en texte est inhabituelle sur ce blogue; en voici les raisons : Mes travaux de ce début d’année ainsi que des discussions personnelles m’ont amené à lire ou relire des récits, textes, documents qui illustrent et/ou explicitent le concept de résilience. Je l’ai fait avec ce recul par rapport à ma propre expérience, ce qui me permet de mettre -modestement- en adéquation le savoir, le ressenti et le vécu et qui donne à mes relectures une saveur nouvelle, un sens approfondi de compréhension pour ne pas employer un terme qui pourrait paraître péremptoire et que pourtant j’ai envie d’employer, celui de l’évidence. Mes pages dites des 23 septembre -date à laquelle j’ai posé mes premiers pas sur le chemin de cette résilience en sortant du déni et en acceptant en premier de me faire soigner- racontent ce travail de résilience, de construction de « nouvelle vie ». Elles me sont personnelles mais comme je l’écris souvent, je les partage comme les lignes de cette Note pour témoigner, à la fois de ma gratitude envers tous ceux qui m’ont aidé et pour délivrer ce message que la souffrance n’est pas une fatalité, que l’espoir est toujours là.
Résilience, compétence et travail sur soi
C’est dans les pays anglo-saxons et nord-américains qu’eurent lieu les premiers travaux sur le concept de résilience qui a pris son essor plus tardivement, dans les années 1990, dans les pays francophones. Si un jour nous arrivons à bien structurer nos observations, nos expérimentations et nos théories, je pense que nous en ferons une théorie de l'anti-fatalité, de l'anti-destin déclarait Boris Cyrulnik dans un colloque qui a fait a fait l’objet d’un livre « Entre résilience et résonnance », avec pour objet: traiter de la place de l’émotion en thérapie. (Voir ma Note du 27 août 2009 « A l'écoute des émotions »).
Voici la définition de la résilience, proposée par Michel Manciaux, Stefan Vanistendael, Jacques Lecomte et Boris Cyrulnik en 2001 : c’est la capacité d’une personne ou d’un groupe à se développer bien, à continuer à se projeter dans l’avenir en dépit d’événements déstabilisants, de conditions de vie difficiles, de traumatismes sévères.
Je ne suis pas un spécialiste de la résilience - un acteur oui je pense - et ne vais donc pas m’essayer ici à développer ce concept qui a fait l’objet de nombreuses études et essais. Votre moteur de recherche se fera un plaisir de déposer en PDF sur l’écran de votre ordinateur ou vous donnera les références des ouvrages que vous pourrez vous procurer sur ce sujet et dans la version de votre choix, papier ou numérique. Non, comme je l’ai mis en titre à ce billet, je voulais juste noter dans ce blogue qui est aussi mon « Carnet de nouvelle vie » - que c’est pour moi une notion fondamentale sur laquelle j’ai ressenti le besoin de faire un point d’étape, d’en approfondir ma compréhension et de le partager avec mes lecteurs.
Quelles compétences, quelles notions du travail sur soi sont nécessaires à associer au concept et au travail de résilience ?
Dans un débat organisé par Psychologie magazine, Boris Cyrulnik et Luc Ferry qui se rencontraient pour la première fois à cette occasion dialoguent autour du thème « Ce qui nous tient debout ». Boris Cyrulnik évoque cette maison que l’on se construit et qui parle de notre vision du monde . Il rappelle la fable racontée dans son livre Parler d’amour au bord du gouffre (page 35 de l’édition poche chez Odile Jacob). La voici :
"Un pèlerin se rend à Chartes et va rencontrer sur sa route trois hommes qui cassent des cailloux
Le premier grimace, respire le malheur. Alors le pèlerin s’arrête et l’interroge :
-Monsieur, qu’est-ce que vous faites ?
L’homme, malheureux, lui répond :
-J’ai trouvé ce métier stupide et mal payé. Et j’ai mal au dos.
Le pèlerin continue son chemin et voit un deuxième homme un peu plus loin, torse nu en train de casser des cailloux. Il lui pose la même question :
-Monsieur, qu’est-ce que vous faites ?
-Eh bien moi, je gagne ma vie comme ça, au moins c’est en plein air, lui répond l’homme.
Plus loin, le pèlerin voit un troisième homme occupé au même travail. Ce dernier respire le bonheur. -Monsieur, qu’est-ce que vous faites ? Et l’homme lui répond :
-Moi ? Je bâtis une cathédrale ! "
Pour Boris Cyrulnik, « cette fable montre que celui qui a une cathédrale dans la tête métamorphose la manière dont il éprouve le réel. Le troisième homme souffre du réel, comme les autres, mais il a une représentation de ce caillou qui lui donne sens. ». Et il poursuit « Je dirige actuellement des thèses sur les survivants résistants dans les camps de déportés. On y constate que ceux qui ont le mieux supporté l’horreur sont ceux qui avaient une « cathédrale dans la tête ». Le simple fait d’imaginer la même cathédrale faisait qu’ils s’aimaient entre eux et pouvaient vaincre leur peur grâce à elle. C’est alors une sublimation nécessaire, dans laquelle il y a de l’affect, du lien, de la représentation d’images… »
Luc Ferry lui répond et nous met en garde : « Le problème, c’est que la cathédrale peut être délirante. Il ne faudrait pas prendre la fable comme si elle revenait à dire : à partir du moment où vous croyez en quelque chose, c’est bien. Non, ce n’est pas forcément bien ! L’idée de transcendance elle-même peut être un nouveau délire, et Dieu sait qu’elle l’a été, qu’elle l’est encore parfois aujourd’hui ». Il poursuit : « l’une des grandes questions qui se pose aux sociétés laïques est sans doute la suivante : quelles valeurs spirituelles et morales, en exigeant des sacrifices de l’individu, peuvent lui permettre de sortir de lui ? L’idée que l’on va tout trouver en soi – idée qui domine parfois le discours psy, certains retours au bouddhisme ou certains thèmes de développement personnel – est une immense illusion, liée justement à la logique du monde de la consommation. »
Ce dialogue passionnant entre les deux hommes démontre que la résilience est un concept complexe. Et qu’être résilient n’est pas un acquis pour la vie, qu’elle exige de poursuivre le travail sur soi, d’être conscient de l’environnement dans lequel nous vivons et d’être toujours en situation de vigilance, face notamment à un évènement, mineur ou majeur et qui peut réveiller –souvent inconsciemment- de vieilles blessures enfouies. La compétence à vivre une « nouvelle vie » passe donc par la compréhension et le désir de ne pas s’endormir sur ce qui pourrait être considéré comme des acquis. C’est le sens que j’essaye de donner quand j’évoque sur ce blogue ou dans les commentaires que je dépose sur d’autres sites de ce réseau social tout ce que j’estime indispensable à mon bien être. Je terminerais ce billet – que (je me répète), j’avoue bien volontiers avoir écrit en premier lieu pour me fixer quelques notes issues de réflexions, vécus, lectures, partages- en citant Rosette Poletti et Barbara Dobbs. Ces deux auteurs, dans un petit ouvrage de vulgarisation nommé «La résilience, l’Art de rebondir » paru chez Jouvence nous donnent un message d’espoir : La résilience est une capacité humaine fondamentale. Tous les individus et à tout âge ont le pouvoir de se transformer et de transformer leur réalité à condition de trouver en eux et autour d’eux les éléments qui leur permettent de créer cette capacité de résilience.» (Page 29 de l’édition de poche)
Vous trouverez, insérés dans la Note quelques liens, volontairement en nombre très limité. De nombreux autres textes, récits, compte-rendu d’études, colloques, débats, listes d’ouvrages… sont disponibles sur Internet. Je tiens ceux que j’ai notés à disposition.
Crédits photos : Louis-Paul Fallot
En haut, la cathédrale Notre-Dame de Paris, octobre 2012
En bas, le port du Cros de Cagnes, fleur sortant du filet de pêche, janvier 2013
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28.11.2012
La contemplation de l'immobile
Et si l’on regarde, on voit : de la simplicité en majesté.
Une présence intense derrière l’immobilité.
Si l’on regarde, on voit que même ce qui ne clignote pas, ne bouge pas, ne scintille pas, ne fait pas de bruit, peut avoir de l’intérêt et de l’importance.
Christophe André, Méditer jour après jour, page 124
Mardi: Il pleut, à torrent.
Je ne peux faire ma promenade quotidienne qui est aussi pour moi mon moment de méditation je dirais de « pleine conscience en pleine nature ».
Souvent la pluie quand elle tombe trop fort, quand les éclairs déchirent le ciel, tout cela peut m’amener au mal être ou à l’angoisse. Heureusement, j’ai « mes outils » et parmi eux la contemplation. Et si j’aime la pratiquer au bord d’un chemin ou de mer, je sais que je peux aussi le faire également « en intérieur » en regardant ce qui m’entoure, où que je sois !
Dans son livre Méditer jour après jour, Christophe André nous invite à nous abandonner au vertige de la contemplation des objets quotidiens : une pomme, un brin d’herbe, un téléphone… .
Christophe André évoque la « nature morte » et s’exclame :
« Quel drôle de nom ! ». Il précise que l’appellation anglaise still life – vie immobile -,
et l’allemande, et la flamande, qui disent la même chose, sont bien plus proches de la réalité(…) Dans ce monde en mouvement, dans ce monde utilitaire,
la nature morte nous arrête : vie immobile, vie inutile.
Inutile ? Parce qu’elle n’a rien à montrer que de l’ordinaire ?
Mais justement : ce qu’elle nous montre, c’est l’ordinaire qu’on ne regarde jamais.
L’auteur, qui pratique la méditation depuis des années l’utilise aussi pour soigner à l’hôpital Saint Anne. Son livre est un beau livre au sens spirituel mais aussi artistique. (Superbes illustrations)
Mercredi: J’entends en écrivant ce billet les prévisions météorologiques qui annoncent la poursuite des précipitations…Je lève les yeux de l’écran de mon ordinateur et un monde s’offre à moi :
Si l’on regarde, on voit qu’il y a de la beauté, de l’intelligence et même de la grâce
dans le simple, l’accessible, le disponible.
Les passages de cette Note en italiques sont extraits du chapitre Voir l’invisible et vous trouverez sur le site de Christophe André la présentation de son livre Méditer jour après jour.
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