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31.08.2011

A l’ombre (ou la lumière) du platane

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Un texte de Dominique W

 

A l’ombre (ou la lumière) du platane

A quelques heures de mes sept saisons en abstinence (1) , je me suis assis sur un banc à la couleur bleu ciel. Le vent se frayait un passage à travers les feuilles, pour aller se perdre peut être, se poser ailleurs sûrement ou tout simplement mourir contre une façade gris claire d'une vieille bâtisse encore debout malgré les avanies du temps qui passe. Une musique se précisait entre les feuilles, un chant mélodieux passait par un trou au milieu d'un vieux platane.
J'étais assis, heureux, le visage caressé par le soleil, assis au même endroit où dans un temps passé et pas si lointain, je gisais ivre mort.

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23.09.2010

La sortie

 

La matinée commence et il est presque 8 heures !

 Malgré les bruits dans le couloir – le mardi est jour de changement de chambres pour les uns, de préparatifs de départs pour d’autres-je n’ai rien entendu des va et vient en dehors de la chambre. A relire ces notes d’il y a 7 ans, je pense que cela devait faire longtemps que je n’avais dormi aussi bien.

Dehors, un beau soleil d’automne ; je me sens en forme.La veille, j’ai passé la visite médicale de sortie : poids, tension tout va bien. Petit déjeuner et un moment très attendu chaque jour, liens avec les siens : le courrier.

 9h : rendez-vous individuel avec le psy, les derniers conseils. Le lundi,  la 8ème et dernière séance d’information en alcoologie a été entièrement consacrée à l’après cure. J’ai soigneusement  noté. Tout d’abord,  bien retenir trois choses importantes : Suivre le traitement médical de plusieurs mois à base de sulfate de magnésium. Avoir toujours à l’esprit le mot « Patience » durant cette  convalescence qui devrait durer un an et pratiquer  toute la vie les exercices psycho-somatiques (La soma) ,   aide précieuse à l’apprentissage du bien-être et  à  la maîtrise de la panique.  Savoir ensuite que des phénomènes déroutants  peuvent survenir dans les mois à venir,  le plus fréquent étant le flash, cette envie subite de boire sans raison qui disparaîtra en quelques secondes après l’absorption de 2 ou 3 verres d’eau. Il y a aussi les « cuites sèches », le « tunnel »…de tout cela ne pas hésiter à parler ! Le docteur parle ensuite de cette vie qui nous attend, les points de vigilance, les rapports avec les autres,  mais surtout avec ce nouveau « soi-même ». Tout est évoqué, l’intime aussi et ce mot noté, si beau Tendresse : « s’accepter le matin et s’aimer toute la journée.»

10h, promenade dans le village, toujours à trois comme durant tout la partie du séjour où les sorties sont autorisées. Au bar et sur la place, on tourne « Une femme d’honneur ». Retour au centre et une dernière séance de « soma » sur la terrasse, exercices assis et debout. Le repas des sortants sera pris dehors, cela fait drôle d’avoir récupéré son téléphone portable. En fait, tout est un peu spécial dans ce temps « d’au revoir ». 

Je viens de passer 29 jours à Cabris. Chaque jour, j’ai essayé de tenir un carnet  et   j’ai écrit sur la dernière ligne  en date du mardi 21 octobre 2003: « 13h30-Départ. Retour à la civilisation. »

 

Illustration La sortie-PhotosLP-2010.jpg

 

LIENS :

Le centre du C.A.L.M.E   

Pourquoi ces notes, chaque 23 septembre ?

23.09.2009

Aujourd’hui, j’ai 6 ans

 
You never know what is enough unless you know what is more than enough.*
 
William Blake
(Proverbes de l'Enfer, 1970)
 
*Vous ne savez jamais ce qui est assez, à moins que vous ne sachiez ce qui est plus qu'assez  
C'est par cette citation que s'ouvre le livre du Dr Philippe Batel et Serge Nédélec
Alcool:
de l'esclavage à la liberté
Récits de vie commentés

les éditions demos

Fenêtre de vie-PhotosLP.jpg

 

Aujourd’hui, j’ai 6 ans.

 

 

Je fête mon anniversaire,  celui de ma Nouvelle Vie.  

Cela paraitra  quelque peu surprenant à mes nouveaux lecteurs (J’en profite pour les remercier),   J’ai créé ce Blog en  2006 et chaque 23 septembre, je publie une Note  

 

Je ne suis pas le seul, des milliers de gens de par le monde soufflent ainsi leurs bougies.

A cette occasion, ils témoignent  de leur vécu, de leur vie avant et après l'alcool.

Ce sont des messages, à la fois de gratitude et d’espoir comme celui de Dominique W  que j’ai publié ici le mois dernier.

 

Ils le font avec émotion, conscient du miracle d’être en vie, n’oubliant pas d’où ils viennent et qu’il importe de poursuivre au quotidien  leur relèvement.  

Ils  racontent en sachant que d’autres sont encore dans la souffrance de l’alcool ou de l’alcool de l’autre.  Que  peut-être, ils  s’identifieront à un fragment de leur histoire et auront l’envie de quitter cette  spirale infernale pour entrer  dans celle du rétablissement. L'envie de vie, en lieu et place du  déni.

Car non seulement ils verront des visages transformés mais  ils entendront cette phrase « oui c’est possible » !

 

Aujourd’hui, j’ai 6 ans.

Je me souviens du livre du Dr Dodson que beaucoup de parents ont lu et qui écrivit le best-seller « Tout se joue avant 6 ans ». Il traite de l’importance des premières années de la vie du jeune enfant.

Ce n’est certes pas  exact avec la maladie alcoolique. Tout se joue chaque jour en ne prenant pas ce premier verre qui déclenche la mécanique infernale pour celui qui est devenu dépendant. Dominique Autié  écrivait "L'alcoolique n'a pas peur de l'abstinence, juste froid aux yeux".

Mais arrêter de boire est une chose, se construire une vie heureuse sans alcool en est une autre. Et ces six années auront été déterminantes en ce qui me concerne sur le chemin de ce que j’appelle ma Nouvelle vie.

 

Si j’évoque le livre du  psychologue  américain, c’est que j’ai profondément ressenti ce cheminement du « petit enfant ».

 

A ma sortie du CALME, je  disais toujours « comme un bébé ».

Comme un bébé, (ré) apprendre à m’alimenter mais d’une autre nourriture que ces poisons liquides ou solides. (Je me suis fait soigner d'une double dépendance.)

Comme un bébé, au début se concentrer sur soi-même et mon bien être au quotidien, me ménager,  me reposer,  tous ces gestes simples oubliés dans le désordre d’une vie qui n’en était plus une.

Puis comme un bébé, apprendre à marcher mais vers d’autres lieux que ceux des rayons  vins et spiritueux  ou des comptoirs de bar.

Apprendre à lire, à écrire en retrouvant à force d’exercices ces facultés mentales bien mises à mal par les ravages de la maladie.

Apprendre à  compter. D’abord les jours d’abstinence puis les dates anniversaires soigneusement notées chaque mois sur le calendrier mural.

Puis comme un bébé, se socialiser, partir sur les chemins de l’école de Nouvelle vie, entreprendre le long apprentissage de la découverte de Soi.

Apprendre à aimer, à s’aimer.

 

Mais un bébé a besoin des autres, d’attention, de soins. Les adultes sont là pour cela.

 

C’est à ces femmes et hommes qui se sont trouvés à un moment près de moi pour m'accompagner que je pense  ce jour. Militants des associations, médecins et infirmières, collègues de travail, famille, amis. 

 

Le jeune enfant reçoit des compliments, des encouragements.

Le dépendant en rétablissement reçoit son premier cadeau. Celui   de voir un jour l’image de son visage, propre, sans rougeurs ni boursouflure, souriant. Le bonheur qui se lit aussi sur les visages de ceux qui vous aiment.

 

Il  voit beaucoup de  promesses se réaliser.  Il ne renie pas son passé, il en assume les conséquences. Cela met des années et il lui faut affronter bien d’autres peurs mais il se refait petit à petit une vie. Son abstinence est un choix, car il a retrouvé ce libre choix qu’il avait perdu. Il n’est pas non plus un zombie ou un extra-terrestre. Il a ses joies et ses souffrances mais ses émotions ne le mènent plus vers « le produit ».

Il vit et s’ouvre à la vie.